Maxilase : quelle efficacité réelle ? Pourquoi le colorant est-il suspecté ?

Le 15 janvier 2020, les médicaments à base d’alpha-amylase passent derrière le comptoir en raison d’un risque de réactions allergiques. Quelle est l’efficacité clinique du Maxilase ? Pourquoi le colorant est-il suspecté ? 

Mi-octobre, dans une lettre adressée aux professionnels de santé, les laboratoires commercialisant le Maxilase et ses génériques alertent sur le risque de réaction d’hypersensibilité associé à l’utilisation de ces médicaments, en accord avec l’ANSM. L’alpha-amylase peut ainsi provoquer des réactions allergiques de type démangeaisons, gonflement, mais aussi angio-œdème ou bronchospasme, voire des chocs anaphylactiques, potentiellement mortels.

Risques d’hypersensibilité 

L’alpha-amylase est une enzyme à visée anti-inflammatoire indiquée dans les états congestifs de l’oropharynx. Elle ne doit pas être prise plus de 5 jours. Il est recommandé d’informer le patient sur ces risques d’hypersensibilité et de l’arrêter à la survenue de tout signe : urticaire, difficulté à respirer, gonflement du visage… Les RCP vont, par ailleurs, être modifiées pour inclure ces risques.

Choc anaphylactique

En 2013, un enfant a été victime d’un choc anaphylactique après l’ingestion de Maxilase sirop, potentiellement causé par le colorant jaune orangé E110. En 2017, un nouveau choc anaphylactique a été rapporté chez un adolescent, poussant l’ANSM à créer une commission de réévaluation bénéfices/risques. Entre 1985 et 2017, les centres régionaux de pharmacovigilance ont recensé 474 cas de réaction liés à la consommation d’alpha-amylase, donc 234 graves et trois décès.

35 cas graves

La moitié des réactions signalée affecte la peau : urticaire, prurit, rash maculopapuleux, dermatose bulleuse… Mais tous n’ont pas pu systématiquement être mis en lien avec la l’alpha-amylase, « 98 cas d’affection de la peau, des tissus cutanés et du système immunitaire ont été comptabilisés pour lesquels l’alfa-amylase était le seul traitement suspect (dont 35 cas graves) », indique l’ANSM dans le compte-rendu de la commission. Ces réactions peuvent survenir très rapidement et dès la première prise.

Colorant sous surveillance

Au-delà de l’alpha-amylase, les excipients pourraient être responsables des hypersensibilités. « Ces spécialités contiennent des excipients à effet notoire tels que le saccharose, le parabène, le glycérol et le colorant azoïque jaune orangé E110 », rapporte l’ANSM. C’est bien ce dernier qui est ciblé. En 2016, l’ANSM a ainsi demandé le retrait du colorant de la forme sirop avant le troisième trimestre 2018. Un an plus tard, le E110 est toujours présent dans le sirop Maxilase, mais pas dans le générique. Le colorant serait, selon une étude de 1982, responsable d’allergies sur les personnes intolérantes à l’aspirine.

Quelle efficacité ?

L’efficacité de l’alpha-amylase est peu démontrée scientifiquement. Sur les 33 études cliniques présentées par les laboratoires titulaires entre 1967 et 1996, seules deux sont robustes méthodologiquement, mais ne concernent pas les populations cibles. Par ailleurs, ni la société française d’ORL, ni celle de pédiatrie ne recommandent son utilisation. Enfin, en l’absence de données, la HAS a jugée que l’efficacité du Maxilase ne pouvait être établie. Quant au Mégamylase, son service médical rendu est jugé insuffisant.

Avis défavorable

La Commission de suivi bénéfices/risques, après délibéré, estime à la quasi-unanimité que « le rapport bénéfices/risques des spécialités à base d’alpha-amylase est défavorable dans les indications de l’AMM ». Certains évaluateurs ont tout de même exprimé des craintes quant au report sur les AINS, néfaste en cas d’angine à streptocoque.

 

Léa Galanopoulo