Eskétamine : une alternative pour la dépression résistante ?

L’eskétamine est l’énantiomère S de la kétamine racémique, anesthésique général. Cet antagoniste non sélectif et non compétitif des récepteurs NMDA entraîne une hausse transitoire de la libération de glutamate, conduisant à l’augmentation de la signalisation neurotophique, qui contribue à une restauration synaptique dans les régions du cerveau impliquées dans l’émotion et l’humeur.

Forme de kétamine

L’eskétamine est l’énantiomère S de la kétamine racémique, anesthésique général. Cet antagoniste non sélectif et non compétitif des récepteurs NMDA entraîne une hausse transitoire de la libération de glutamate, conduisant à l’augmentation de la signalisation neurotophique, qui contribue à une restauration synaptique dans les régions du cerveau impliquées dans l’émotion et l’humeur.

Spravato spray

L’effet de la kétamine sur la dépression est à l’étude depuis des années. En 2013, la FDA a approuvé l’eskétamine dans le traitement de la dépression réfractaire aux traitements. Six ans plus tard, c’est au tour de la Commission européenne d’accorder une AMM à l’eskétamine. Le traitement est par ailleurs vanté par Donald Trump. Selon le Guardian, le président aurait passé en 2019 des commandes importantes d’eskétamine. En France, Spravato (eskétamine spray 28 mg) de Janssen est commercialisé depuis le 1er octobre.

Indication restreinte

Le Spravato est indiqué en association à un ISRS ou un ISRN, chez les adultes de moins de 65 ans, en traitement des troubles dépressifs résistants, n’ayant pas répondu à au moins deux antidépresseurs différents, et en cas de refus ou de contre-indication à l’électroconvulsivothérapie. L’administration se fait uniquement en hospitalier par un psychiatre. La voie d’administration nasale évite l’effet de premier passage hépatique.

Des résultats en demi-teinte

Les études présentées par Janssen à la HAS montrent des résultats en demi-teinte. Après 4 semaines de traitement, la supériorité de l’eskétamine versus placebo est faible et peu significative, même si le laboratoire avance des « résultats cliniquement significatifs ». L’eskétamine permettrait cependant un maintien en rémission après 16 semaines et une diminution du risque de rechute. Aucun effet, en revanche, chez les patients âgés de plus de 65 ans.

Dissociation

Le point noir de l’eskétamine reste ses effets indésirables. Les plus fréquents ? Sensations vertigineuses, dissociations, céphalées, somnolence, dysgueusie, hypoesthésie et vomissements. Entre 60 et 79 % des patients vont en outre présenter un trouble dissociatif proche de ceux connus pour la kétamine, utilisée aussi comme drogue récréative : hallucinations, confusion, sensation de quitter son corps ou de mort imminente. Après administration, le patient doit ainsi être surveillé à l’hôpital. La pression artérielle devra notamment être réévaluée 40 minutes après.

Que dit la HAS ?

La HAS a rendu un avis favorable au remboursement, mais avec un service médical rendu (SMR) faible. Elle juge l’amélioration du SMR inexistant. L’agence regrette par ailleurs les contraintes liées à la tolérance du produit – trois cas de suicide ont été observés chez le groupe eskétamine contre zéro dans le groupe placebo. Pour la revue Prescrire : « La balance bénéfice/risque est défavorable et l’efficacité incertaine ». Janssen, pour sa part, se félicite de ce « tournant », un « nouvel espoir » alors que pour la première fois depuis 30 ans un nouveau mécanisme d’action est mis sur le marché pour la dépression.

Risques de dépendance ?

Ils ne peuvent être écartés ! Les risques d’abus et de mésusage de l’eskétamine sont accrus chez les patients ayant des antécédents de pharmacodépendance. Par ailleurs, des effets de dépendance, de tolérance et de symptômes de sevrage ont été mis en évidence avec la kétamine. L’eskétamine est considérée comme un stupéfiant. •