H2O + EtOH = la solution !

Pénurie, réactivation des préparatoires, encadrement des prix, demandes explosives. Les gels et solutions hydro-alcooliques ont fait parler d’eux. Point de vue d’un préparatoire marseillais.

Habituellement mis en valeur sur le comptoir, parfois dans un joli petit bocal, les gels hydro-alcooliques industriels se sont arrachés comme des petits pains dès les prémices de l’épidémie, avant de devenir introuvables. Les capacités de production industrielle se sont retrouvées bien insuffisantes face à la demande exponentielle.

« À cette époque-là le cadre réglementaire ne nous permettait pas de préparer des solutions hydro-alcooliques, j’étais d’ailleurs intervenu à ce sujet lors des Rencontres de l’Officine. Nous avions retrouvé une formulation proposée par l’OMS », se rappelle Guy Berthollet, pharmacien et président du préparatoire FrancePrep. Une formule simple, à quatre ingrédients, est aujourd’hui célèbre.

Mise en ordre de marche

Il existait alors un vide réglementaire. « Nous ne nous inscrivions ni dans le cadre de la préparation magistrale, qui est une préparation extemporanée sur la base d’une prescription médicale pour un patient donné, ni dans le cadre de la préparation officinale qui fait référence à des formules issues du formulaire national », explique Guy Berthollet.

© FrancePrep

« On a malheureusement vu pointer sur le marché des formulations un peu exotiques, avec des titres alcooliques inférieurs à toute activité bactéricide ou virucide. »

Les préparatoires avaient vu les demandes augmenter et avaient tout de même décidé de se mettre en capacité, en attendant une évolution de la réglementation. « Évolution qui est arrivée le 5 mars avec un premier décret visant à encadrer le prix de vente des gels HA, après une flambée des prix. Le jour suivant, le décret du 6 mars permettait aux pharmacies d’officine de préparer des solutions HA. Voilà le point de départ », retrace Guy Berthollet. Les pharmaciens se sont alors retroussé les manches pour tenter de satisfaire tant bien que mal la demande.

« Un exercice d’équilibriste permanent »

Rapidement, la production de solution HA a été freinée par le manque de matières premières. « La demande étant mondiale, très vite, l’alcool au titre dont nous avons besoin a commencé à manquer », confirme le président de FrancePrep. Lorsque ce n’est pas l’alcool, c’est l’eau purifiée ou la glycérine et même quand tous les ingrédients sont réunis, ce sont les contenants qui viennent à manquer. « C’est un exercice d’équilibriste permanent ! » Sans parler des problèmes de logistique liés au transport de telles quantités de solutions hydro-alcooliques.

Il en découle une recherche minutieuse des matières premières que tout le monde s’arrache. « Les textes ont évolué et permis l’usage de l’éthanol alimentaire, c’est là que Pernod-Ricard a proposé des stocks d’alcool utilisé habituellement dans ses distilleries », rapporte le dirigeant. D’ailleurs, de nombreuses entreprises ont partagé leur expertise, comme le groupe LVMH, dont les laboratoires de parfumerie ont été reconvertis pour préparer des solutions HA. La demande n’est pas près de diminuer et, si la production industrielle s’accélère, la préparation de solution HA va rester d’actualité pendant quelque temps. •


L’arme fatale : le savon !

Il est important de rappeler, surtout lorsqu’il n’y a plus de solution hydro-alcoolique, que le savon est extrêmement efficace contre le virus ! Sa structure classique (bicouche lipidique, protéines et ARN, sans liaisons covalentes) est balayée par le savon, dont la nature amphiphile permet de se mélanger facilement à l’eau, de bien se répandre sur les mains et de rentrer en compétition avec la membrane lipidique du virus. •