Comment vont survivre les petites officines ?

Pour cette première édition des Amphis de l’officine organisée le 18 juin par la FSPF, il a été question de l’évolution du modèle économique en officine. Les spécialistes se sont succédé pour comprendre les déboires économiques des officines. Ont-ils des solutions concrètes ?

Le bilan est là : près de 250 officines ont dû mettre la clef sous la porte en 2018, tout comme l’année précédente. Si les chiffres d’affaires sont en légère hausse, ce n’est qu’artificiel. «  Les produits chers, c’est l’arbre qui cache la forêt » précise Joël Lecoeur, président de CGP. Les médicaments sortis de la réserve hospitalière, comme les AAD et certains anticancéreux, gonflent les chiffres, mais rapportent très peu aux titulaires.

Il y a une rupture forte cette année, entre les petites officines qui décrochent et les grandes officines qui progressent. « La taille est un élément déterminant dans l’analyse de la rentabilité » confirme Monsieur Lecoeur, l’excèdent brut d’exploitation (EBE) double entre les officines en dessous de 1 million d’euros de CA et celles au-dessus de 1,5 million.

« Mais ce n’est pas qu’une question d’argent, il faut trouver un modèle qui fonctionne »  assène Philippe Besset, président de la FSPF, lors de l’ouverture des discussions.

Quels problèmes, quels modèles ?

Le monde de l’officine est divisé en deux modèles. Les pharmacies de proximités tant chéries par les intervenants, avec de « petits » chiffres d’affaires, chargées année après année de plus de missions de santé et dont les pharmaciens, chantres de la santé publique, ne seraient pas des commerçants. Et les « méga-officines », aux pharmaciens businessmen qui engrangent de très impressionnantes sommes d’argent, grâce à une logique de prix. Les questions posées lors de la table ronde : comment aider ces petites pharmacies face à leurs grandes sœurs et comment préserver le précieux maillage territorial.

Pour réaffirmer les pharmaciens dans leur rôle de professionnel de santé, les pouvoirs publics leur ont confié toujours plus de missions (prévention, vaccination, télémédecine…) qui sont coûteuses à installer, et demande de l’espace. Or les petites officines de proximités manquent de moyens et de place. « Formidable idée de donner de nouvelles missions aux pharmaciens. C’est une encore meilleure idée de les inciter financièrement et ce n’est pas encore fait » affirme Sophie Sergent, pharmacienne d’officine, élue URPS et présidente de la commission pharmacie clinique et exercice coordonné à la FSPF. « L’effet pervers c’est que ces grosses pharmacies vont pouvoir capitaliser sur ces politiques de santé publique » analyse quant à lui Claude Le Pen, économiste de la santé et professeur à l’Université Paris-Dauphine.

Quelles solutions peuvent être proposées ?

Le problème est désormais posé, il faut mettre en avant des solutions. Patrick Vignal, député LREM de l’Hérault, se lance : « je propose une fiscalité plus intéressante pour le pharmacien en centre-ville ». Il propose ainsi d’inscrire dans le plan de revitalisation des centres-ville du gouvernement une aide pour les pharmaciens. Pour Claude Le Pen la feuille de route est « définir une politique, définir des zones à risque, définir des moyens ». Mais comment définir ces zones ? « Il manque des datas pour travailler » estime Philippe Besset, il faudrait certainement l’aide des ARS et URPS pour élaborer un zonage.

Et Philippe Besset de conclure ces premiers Amphis de l’officine : « Je suis très content que l’on ait identifié le problème ». Maintenant que le diagnostic est posé, les experts se laissent un an d’action et de réflexion avant d’en rediscuter à la seconde édition en 2020.