Sophie Dufau Helme, docteure en pharmacie, coach certifiée et formatrice en management et en communication, dirigeante de l’organisme de formation SOPTIMIZ PARTNER, nous livre ses conseils pour bien mener les entretiens annuels d’activité.
« Les gens ont besoin de se sentir écoutés »

Sophie Dufau Helme, docteure en pharmacie. DR
Revue Pharma : Quel est votre principal conseil pour les entretiens annuels ?
Sophie Dufau Helme : De les faire ! Souvent, les titulaires me disent « j’échange avec mon équipe tout au long de l’année, au fil de l’eau » mais ce n’est pas pareil ! Les gens ont besoin de se sentir écoutés. Il faut leur consacrer un vrai temps – au moins 45 minutes – en individuel. L’entretien annuel est une étape importante de la fin d’année, l’occasion de faire le bilan, de se projeter sur celle à venir et d’écouter les collaborateurs. Le titulaire doit l’annoncer à l’équipe, en faire un événement, et prévoir les rendez-vous à l’avance pour que lui et les salariés aient le temps de les préparer.
Existe-t-il une méthodologie à suivre pour mener ces entretiens ?
Généralement, je conseille de commencer par les adjoints et les salariés les plus anciens, pour avoir un ressenti global. Puis, en ce qui concerne les entretiens en eux-mêmes, je recommande aux titulaires de préparer un document (voir avec les groupements et/ou PHSQ) et de le donner, en amont, aux collaborateurs afin qu’ils le complètent. Les points suivants peuvent y être abordés : les actions significatives de l’année, les faits marquants, les objectifs atteints, le développement personnel, les nouvelles missions, etc.
Quand il y a plusieurs titulaires, doivent-ils forcément être ensemble lors des entretiens ?
Tout dépend de la taille de l’officine. À partir de 8 à 10 salariés, il vaut mieux se répartir les tâches. Pour bien les réaliser, il est indispensable de préparer les entretiens en amont pour que les titulaires abordent les mêmes points lors de ces moments d’échange. Ensuite, quand tous les entretiens sont terminés, un temps doit être consacré à la synthèse des retours et à l’échange entre titulaires, car la matière recueillie sert de base pour l’année à venir.
Comment repérer les éventuels signes de démotivation lors d’un entretien ?
La démotivation vient d’une accumulation de petites frustrations. Pour la mesurer, je conseille « l’exercice des motivateurs » : le titulaire prépare une liste de motivateurs (par exemple, les missions, les responsabilités, le développement personnel/la formation, le temps, l’autonomie, les moments de qualité, l’ambiance d’équipe, etc.) que le salarié doit classer par ordre de priorité. Une fois la liste établie, le titulaire demande quels sont les motivateurs comblés et ceux qui ne le sont pas assez, au sein de l’officine.
C’est l’occasion d’en parler, d’accéder à une demande ou, quand ce n’est pas possible, d’expliquer les raisons. Pour que les salariés restent motivés, leur fiche de fonction doit évoluer au fil des années. C’est une bonne façon de les fidéliser.
Comment réagir face à un salarié qui a des problèmes personnels ?
Si le titulaire a remarqué un changement de comportement chez le collaborateur – manque de concentration, isolement, mutisme, etc. –, il peut en parler lors de l’entretien. Il ne faut pas être trop intrusif et rester sur les faits : « j’ai remarqué qu’à plusieurs reprises tu étais en retard/tu as fait des erreurs… J’aimerais savoir comment tu vas ? ». Certains salariés se confieront, d’autres non. Néanmoins, le titulaire doit fixer des limites pour se protéger lui-même et préserver l’équipe. En effet, la vie privée d’un collaborateur qui va mal peut influencer son traitement par rapport aux autres. Le titulaire doit veiller à ne pas créer d’inégalités ou bien l’expliquer à l’équipe. C’est un équilibre à trouver.
Doit-on aborder la question du salaire ?
Si la personne indique que le salaire est l’une de ses frustrations, il faut en discuter. Dans le cas inverse, le mieux est de ne pas aborder cette question, car les 45 minutes à une heure d’entretien passent vite et ce n’est pas le but de ce bilan annuel. Si le salarié profite de ce moment pour négocier, le titulaire peut lui répondre qu’il fera une synthèse de l’échange afin de pouvoir en reparler plus tard. ■
Les entretiens annuels : que dit la loi ?Par Hortense Gendron
Le Code du travail distingue deux types d’entretien qui peuvent être réalisés à échéance régulière. • L’entretien professionnel : une obligation L’article L. 6315-1 du Code du travail dispose que tous les deux ans, salarié et employeur doivent se retrouver pour réaliser un entretien professionnel. Chaque salarié de l’officine qui a au moins deux ans d’ancienneté doit donc bénéficier de cet entretien qu’il soit en CDI, CDD, contrat d’apprentissage ou de professionnalisation. Il doit également être proposé entre autres au salarié de retour d’un arrêt maternité, d’adoption, d’un congé parental d’éducation, sabbatique ou de proche aidant. Le Code du travail précise que cet entretien doit être consacré à un échange sur les perspectives d’évolution professionnelle du salarié, notamment en termes de qualifications et d’emploi. C’est l’occasion pour le salarié d’être informé sur l’activation de son compte personnel de formation (CPF) et ses modalités d’exercice. En pratique ? En pratique, l’employeur invite le salarié à un temps d’échange. Afin de se ménager une preuve, il est prudent que cette invitation soit réalisée par écrit. Le temps d’échange d’une durée libre permet au salarié et à l’employeur de réfléchir sur l’évolution du salarié : veut-il prendre de nouvelles missions ? Souhaite-t-il une formation ? Connaît-il le dispositif du CPF ? > Mais attention, le Code du travail indique que cet échange ne doit pas porter sur l’évaluation du travail du salarié. À l’issue de ce temps d’échange, un compte rendu doit être rédigé en double exemplaire, puis signé par le salarié et l’employeur. L’Opco EP met à disposition sur son site une trame de compte-rendu. Cet entretien obligatoire est assimilé à du temps de travail effectif. Il doit donc se tenir pendant le temps de travail du salarié. S’il a lieu hors de ses horaires de travail, il donne lieu à rémunération.
• L’entretien d’évaluation : une faculté au choix de l’employeur Chaque année, l’employeur peut organiser un entretien d’évaluation pour suivre les performances du salarié. Cet entretien relève de son pouvoir de direction. Cependant, la mise en place du système d’évaluation de la performance du salarié implique son information. L’employeur doit indiquer, par écrit pour éviter les litiges, les critères qui seront observés pour apprécier les résultats. Lors de l’entretien, qui donne lieu à un compte-rendu, le salarié et l’employeur font le point sur le travail accompli et les performances particulières du salarié pour la période écoulée. Ils discutent des axes d’amélioration possibles et des missions à venir. Cet entretien peut avoir lieu avant ou après l’entretien professionnel. |