Optimiser son transfert, c’est avant tout gérer le temps et anticiper. On ne parlera pas ici de l’optimisation et de l’opportunité du transfert sur un plan économique, mais plutôt de la gestion du temps nécessaire à la finalisation d’une opération de transfert qui s’avère bien plus longue que l’on se l’imagine.
Le délai moyen d’une opération de transfert, c’est-à-dire entre la prise de décision et le transfert effectif, est d’environ une, voire deux années.
Préparer son dossier de transfert
Signature du bail et conditions suspensives
Dans la phase préparatoire, la négociation des conditions d’occupation du nouveau local est essentielle : un transfert ne peut se concevoir sans le local dans lequel l’officine doit être transférée, de sorte qu’il importe avant tout de négocier avec le bailleur les modalités du bail commercial (superficie en cas de locaux neufs ou en cours de construction, loyers, charges, etc.), mais plus encore la date de prise d’effet du bail.
Signer un bail sans stipuler une condition suspensive, conduirait à devoir payer les loyers à compter de la signature du bail et, si le transfert est refusé ou annulé, devoir acquitter les loyers jusqu’à la première échéance triennale. Il en est de même en cas d’achat des murs : outre les conditions financières de l’achat, il est impératif de stipuler la même condition suspensive. Ne pas mentionner de condition suspensive serait une pure folie sur un plan économique.
Il est donc fondamental de négocier une condition suspensive d’obtention d’un arrêté de transfert purgé de tout recours, ce qui, approximativement, fixe le point de départ du bail ou de la signature de l’acte d’achat définitif des murs à environ un an de sa date de signature, compte tenu des délais d’instruction et de recours.
Des discussions délicates
Les discussions avec le bailleur ou le vendeur des murs seront donc particulièrement délicates et il sera vraisemblablement nécessaire, afin de compenser le manque à gagner, de verser au bailleur une indemnité d’immobilisation (par exemple tout ou partie des loyers) pendant une période déterminée ou, en cas d’achat des murs, une somme forfaitaire si la condition suspensive ne se réalise pas.
En amont du dépôt de la demande de transfert, il est également indispensable de préparer le dossier relatif à l’aménagement des locaux, aménagements intérieurs et extérieurs. En effet, le dossier de transfert doit comporter un plan des locaux extrêmement précis et si des travaux sont à réaliser à l’extérieur, il doit être produit une autorisation de travaux, voire un permis de construire, accordée par les autorités compétentes et dont les délais d’instruction et de recours peuvent atteindre 4 mois (voire davantage si le local est dans le périmètre d’un monument historique). Le dossier bouclé, il sera déposé à l’ARS.
Délais d’instruction et de recours
Délai d’instruction de la demande de transfert
Le délai d’instruction d’un dossier de transfert est de 4 mois à compter de la date à laquelle l’ARS accuse réception d’un dossier complet. L’ARS doit donc disposer d’un délai minimum pour consulter les pièces du dossier pour, soit accuser réception du dossier complet, soit demander des pièces complémentaires. Il est inenvisageable de déposer un dossier incomplet pensant « bloquer » l’antériorité en cas de demandes concurrentes, et commencer le décompte des 4 mois.
En cas de décision favorable, le transfert ne peut être réalisé avant l’expiration d’un délai de 3 mois. À compter de la publication de l’arrêté de transfert au recueil des actes administratifs, les tiers (confrères, conseil de l’Ordre) disposent d’un délai de 2 mois pour saisir le ministre d’un recours hiérarchique, lequel ministre dispose quant à lui d’un délai de 2 mois pour se prononcer.
Et si le recours est rejeté ?
Si le recours est rejeté, les tiers disposent d’un nouveau délai de 2 mois pour saisir le juge administratif, qui tranchera dans un délai d’environ 3 voire 4 ans, auquel cas on entre dans une problématique d’ordre stratégique puisqu’un arrêté de transfert n’est valable que deux ans (contre une année auparavant) et ne peut être prolongé qu’en cas de force majeure, une procédure contentieuse ne constituant pas un cas de force majeure.
En cas de recours contentieux, le pharmacien devra décider s’il prend le risque de transférer, avec comme conséquence en cas d’annulation de l’arrêté, de devoir fermer son officine, sans pouvoir réintégrer les locaux initiaux, entre-temps restitués au bailleur, et se retrouver passible de poursuites pour exercice illégal…
Ce qui est certain, c’est qu’il n’est pas envisageable – sauf cas particulier où le transfert est localisé à quelques mètres de distance – de transférer l’officine tant que le recours ministériel contre l’arrêté de transfert n’est pas purgé. Des négociations peuvent également s’envisager avec le bailleur des locaux dans lesquels l’officine est exploitée avant son transfert, car à moins d’être en fin de période triennale permettant de mettre un terme au bail, le titulaire devra acquitter durant ce laps de temps, de deux loyers (celui de l’ancien et celui du nouveau local).
Mais attention, ces négociations ne devront intervenir qu’une fois l’autorisation définitivement acquise. •