Les changements législatifs récents, s’ils ont singulièrement modifié l’exercice de la pratique officinale, faisant du pharmacien titulaire un entrepreneur, lui ont également ouvert la possibilité de choisir un mode d’exploitation afin d’optimiser sa fiscalité. C’est sans compter l’âpreté de l’administration fiscale qui veille au grain…

Le régime fiscal du pharmacien : une distinction facile à appréhender entre impôt sur le revenu et impôt sur les sociétés
Le choix entre l’IR et l’IS est induit par la forme juridique de l’exploitant :
IMPÔT SUR LE REVENU : Le pharmacien qui exerce en nom personnel ou en Société en nom collectif – SNC- (Nb : ce type de société n’est plus du tout usité depuis l’apparition des SEL) est imposé sur les revenus professionnels qu’il tire de son activité, ses revenus venant s’ajouter à celui de son foyer fiscal.
Son impôt sera alors calculé selon le barème progressif fixé par l’administration fiscale, qui tiendra compte de divers facteurs tels que sa situation familiale, les déductions fiscales et crédits d’impôt auxquels il peut prétendre.
IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS : C’est la structure d’exploitation (en un mot la société) qui paiera l’impôt sur les sociétés, impôt qui est à taux fixe (à ce jour 25 %) et s’applique dès le premier euro de bénéfice ; à noter qu’il existe des taux réduits pour les petites et moyennes entreprises.
Cet impôt est payé en amont de la distribution des dividendes entre les associés.
Il est entendu que le fait pour la société d’acquitter l’impôt sur les sociétés n’exonère pas pour autant les associés d’avoir à payer leurs impôts au titre des rémunérations qu’ils perçoivent ; ne rêvons pas…
Quid des dividendes ?
Les dividendes que se versent les associés sont considérés comme des revenus mobiliers et sont soumis à un régime fiscal spécifique : l’abattement de base de 40 %, applicable si l’on opte pour l’imposition au barème progressif de l’impôt sur le revenu et permet de réduire la base imposable.
On peut également opter pour la flat tax : les dividendes sont soumis à un prélèvement forfaitaire unique de 30 % (12,8 % d’IR et 17,2 % de prélèvements sociaux).
Le statut social du pharmacien : c’est là que ça se gâte…
Jusqu’à récemment, le statut social du pharmacien était (relativement) simple :
- La rémunération du travail d’un gérant de SELARL relevait du régime des Travailleurs non salariés (TNS) ;
- La rémunération du président d’une SELAS relevait d’une double affiliation :
– au régime TNS, au titre de son activité de pharmacien titulaire ;
– au régime général des assimilés salariés (il ne cotise pas au chômage), au titre de son mandat social. Afin d’éviter les surcoûts liés au statut salarié et notamment les charges sociales s’y rapportant, la rémunération du dirigeant lui était versée quasi exclusivement au titre de son activité de pharmacien titulaire.
En d’autres termes, le statut social du pharmacien dépendait du type de société dans laquelle il exerçait et c’est plus précisément sa rémunération qui déterminait son statut social (TNS ou assimilé salarié), avec toutefois un point commun : les deux éléments de rémunération étaient soumis au même régime des traitements et salaires, permettant de déduire les frais professionnels forfaitaires à hauteur de 10 % dans la limite de 13 522 €.
Mais c’était trop simple ! Des nouveautés en 2024…
C’est alors que l’administration fiscale s’est avisée, au grand dam des professionnels du chiffre et du droit, de décider qu’à compter du 1er janvier 2024, les rémunérations des professionnels libéraux exerçant en SEL (toutes formes confondues) relèveraient du régime des BNC. Régime qui ne permet pas de déduire forfaitairement les frais professionnels à hauteur de 10 %.
Régime qui induit aussi de multiples contraintes d’ordre administratif et comptable (tenue d’une comptabilité BNC, établissement et télédéclaration annuelle d’une liasse fiscale 2035, soumission à la TVA et à la CFE, ouverture d’un compte bancaire séparé du compte de la pharmacie et du compte personnel du titulaire sur lequel devra être versée sa rémunération), dont l’administration fiscale s’est gardée, sous réserve de quelques réponses partielles d’indiquer si elles seraient formellement exigées).
Seule certitude : l’abattement de 10 % est définitivement perdu…
Dans sa grande mansuétude, l’administration fiscale a précisé que, par exception, les gérants de SELARL, s’ils peuvent justifier être dans l’incapacité de distinguer la part de leur rémunération provenant de leur mandat de celle provenant de leur activité libérale, pourront rester sous le régime de l’Article 62 et conserver la déductibilité des 10 %.
Distinction déjà appliquée pour les rémunérations des dirigeants de SELAS, sans pour autant que cela constitue une exception à un principe !