L’alerte de l’ANSM est claire : « En cas de rhume, évitez les médicaments vasoconstricteurs par voie orale !». Dans communiqué, daté du dimanche 22 octobre, l’Agence du médicament met en garde sur les risques d’infarctus du myocarde et d’accidents vasculaires cérébraux « quelles que soient la dose et la durée du traitement », liés à l’utilisation de pseudoéphédrine. Une dangerosité à mettre au regard du « caractère non indispensable des vasoconstricteurs ».
En février 2023, une réévaluation du rapport bénéfice/risque de la pseudoéphédrine avait été initiée au niveau européen à la demande de l’ANSM. L’analyse confiée au PRAC, le comité de pharmacovigilance en Europe, sera publiée d’ici la fin de l’année. L’ANSM, membre du réseau réglementaire européen des agences sanitaires, a pris les devants, sans attendre les conclusions du rapport, en déconseillant fortement les vasoconstricteurs suite aux « données récentes issues des bases de données de pharmacovigilance et de la littérature médicale faisant état de cas de syndromes d’encéphalite réversible postérieure (PRES) et de syndromes de vasoconstriction cérébrale réversible (RCVS) », après la prise du médicament oral contenant de la pseudoéphédrine.
Le Collège de la médecine générale, le Conseil national professionnel d’ORL, ainsi que l’Ordre national des pharmaciens et les syndicats de pharmaciens d’officine soutiennent l’agence en s’associant à cette recommandation.
« L’ANSM remplirait pleinement son rôle en les suspendant immédiatement »
La revue indépendante Prescrire, favorable à une interdiction des vasoconstricteurs depuis près de quinze ans, voit ce message comme un progrès : « Ceci revient à constater enfin que leur balance bénéfices-risques est défavorable dans le rhume, ce que la revue Prescrire a souligné inlassablement depuis 2007 », mais tout de même insuffisant. La revue va plus loin et affirme que « l’ANSM remplirait pleinement son rôle en suspendant immédiatement leurs autorisations de mise sur le marché (AMM) » et ajoute même qu’il ne faut pas attendre « les résultats hypothétiques d’une procédure européenne de réévaluation de ces médicaments ».
À noter que l’ANSM avait déjà publié des avertissements antérieurs sur l’utilisation des vasoconstricteurs en décembre 2021 et diffusé une fiche d’aide à la dispensation des vasoconstricteurs par voie orale en novembre 2022, à destination des pharmaciens.
Les labos pharmaceutiques s’offusquent
Cette communication de l’ANSM ne fait cependant pas l’unanimité, notamment du côté des labos. Ainsi, l’organisation professionnelle qui représente les laboratoires pharmaceutiques des médicaments sans ordonnance, NèreS, dénonce « une communication prématurée alors même que les conclusions scientifiques du comité́ de pharmacovigilance européenne n’ont pas encore été livrées ». Les représentants des industriels estiment que « l’ANSM ne respecte pas la procédure qu’elle a elle-même initiée et communique avant même d’avoir obtenu les conclusions du comité́ de pharmacovigilance européenne ».
Mais Christelle Ratignier-Carbonneil, la directrice de l’ANSM, reste sans appel au micro de FranceInfo : “L’objectif au niveau national est que ces médicaments disparaissent des officines, mais aussi des armoires à pharmacie” et d’ajouter « on ne risque pas l’AVC pour un nez bouché »
Les médicaments concernés sont :
- Actifed Rhume
- Actifed Rhume jour et nuit
- Dolirhume Paracétamol et Pseudoéphédrine
- Dolirhumepro Paracétamol Pseudoéphédrine et Doxylamine
- Humex Rhume
- Nurofen Rhume
- Rhinadvil Rhume Ibuprofène / Pseudoéphédrine
- Rhinadvilcaps Rhume Ibuprofène/ Pseudoéphédrine