Bien décrypter son environnement médical

Au côté des outils de géomarketing, de plus en plus sophistiqués, les répartiteurs, s’appuyant parfois sur leur réseau ou leur prestataire interne, s’attachent à développer une coopération efficace.

Depuis 2011, l’OCP propose une étude géomarketing aux pharmaciens désireux de s’installer, de se regrouper, de transférer leur officine ou, tout simplement, de doper leur chiffre d’affaires. Cette étude se déroule en quatre étapes. La première a pour but de recueillir les données nécessaires pour qualifier la zone de chalandise et identifier les pharmacies concurrentes et les professionnels de santé exerçant à proximité. La seconde consiste à analyser le point de vente et son environnement : emplacement, attractivité, bassin de santé, bassin commercial… La troisième est une analyse socio-démographique qui s’appuie sur la construction de la zone de chalandise et le profilage de la population. La quatrième enfin est l’estimation du chiffre d’affaires prévisionnel. « La synthèse de ces quatre étapes nous permet de faire des recommandations personnalisées en termes de marketing, d’assortiment, de segments de produits à privilégier…, tout ce qui va contribuer à développer le potentiel de l’officine, indique Guénola Giangrasso, directrice marketing et communication. L’idée est de développer les activités correspondant aux besoins et, au final, d’accroître la rentabilité du point de vente ».

En novembre 2014, l’OCP a étoffé ses prestations et lancé un cycle de conférences dédié à l’interprofessionnalité, « un trait d’union nécessaire au service du patient » résume Guénola Giangrasso. Au mois de mars, 36 conférences avaient déjà eu lieu dans toute la France, réunissant plus de 1 000 pharmaciens, pour certains venus accompagnés de professionnels de santé de leur entourage : médecins, infirmiers, kinés… « L’interprofessionnalité est un vrai sujet, commente Guénola Giangrasso. Elle est voulue par les pouvoirs publics car elle répond à un objectif d’organisation plus efficace du parcours de soins du patient. Les bases légales de sa mise en œuvre sont posées. C’est aussi une réponse au besoin de prise en charge personnalisée des patients, en particulier chroniques et polymédiqués. Au-delà, l’interprofessionnalité constitue, pour le pharmacien, un enrichissement de sa pratique par le travail en réseau avec d’autres professionnels de santé, et des sources de revenus complémentaires. C’est une dynamique qu’il faut décrypter et structurer. Avec cette nouvelle initiative, nous avons voulu susciter les envies de s’y lancer ». Avec succès : très appréciées, ces conférences permettent aux participants de réfléchir aux opportunités d’évolution de leur métier et de mettre en place des démarches proactives ».

Définir des objectifs communs

Les consultants du réseau Alphega Pharmacie France proposent eux aussi régulièrement des audits géomarketing destinés à augmenter la rentabilité et le chiffre d’affaires, mais également à fidéliser la clientèle et à en capter une nouvelle. « Ces outils, dont une partie est dédiée à l’environnement médical et concurrentiel, ont pour objectif d’inciter nos pharmaciens à définir une véritable politique merchandising, explique Stéphanie Bazin, responsable marketing des points de vente Alphega Pharmacie. Cette politique doit reposer sur une offre de produits et un assortiment adaptés aux prescripteurs de proximité quels qu’ils soient – médecins généralistes et spécialistes, hôpitaux, maternités, maisons de retraite… – qui, à leur tour, peuvent être amenés à recommander telle ou telle pharmacie ».

Le réseau apporte également soutien et conseils pour des problématiques ponctuelles comme la perte de prescripteurs dans l’environnement ou des inquiétudes liées à la viabilité du point de vente. Il peut ainsi aider dans la réflexion avec les élus locaux pour connaître les potentialités de l’offre médicale afin de prendre les décisions qui s’imposent.

Depuis l’année dernière, Alphega Pharmacie France a très fortement intensifié le rythme des rencontres organisées sur le thème de l’interprofessionnalité, que le réseau avait lancées en juin 2013, lors de la mise en œuvre du dispositif d’accompagnement des patients sous AVK. « La mise en place de ces entretiens et, plus globalement, le suivi des patients chroniques sont des enjeux majeurs de réussite des services à l’officine, souligne Mathilde Leimgruber, directrice marketing et éthique du réseau. Alphega Pharmacie a en outre placé l’interprofessionnalité au cœur de son actualité. Nous nous sommes donc naturellement emparés de ce thème pour aider nos adhérents à mieux collaborer avec le corps médical, en se faisant d’abord connaître, puis en créant le contact, la confiance et, in fine, une relation professionnelle construite à partir de la définition d’objectifs communs sur des patients à risque. Il faut faire tomber les barrières : lorsque l’on se connaît, que chacun sait ce que fait l’autre, on réussit à travailler ensemble. C’est ce à quoi nous nous employons ».

Valoriser le contrôle de l’observance

Pour leur part, les pharmaciens exerçant sous l’enseigne Pharmavie bénéficient de la force de frappe de Phoenix Pharma qui peut, si besoin, sortir l’ensemble de leurs données d’activité, les analyser et les comparer à leur environnement. « L’étude de la zone d’attractivité, de la performance de cette zone dans l’absolu et de celle de l’officine sont des indicateurs précieux qui dictent les décisions de gestion à prendre, comme la révision de la politique de merchandising par exemple », relève Laurent Cuiry. Mais la vraie valeur ajoutée du groupe est le mandat aux achats. « Le modèle du groupement change beaucoup, reprend le président de Phoenix Pharma. Désormais, nous négocions les remises dans le cadre d’une obligation d’achat, qui se concrétise par un accord d’un an renouvelable entre chaque officine Pharmavie et les laboratoires. Cette innovation est actuellement testée par un groupe pilote d’une centaine d’officines représentant un volume d’achats d’environ 600 M€ ». Il y a quelques mois, le groupe a également lancé la Phoenix Université, dotée d’un catalogue de formations majoritairement ciblé sur les AVK et, bientôt, sur l’asthme.

« Tous ces outils contribuent à développer une coopération interprofessionnelle efficace, assure Laurent Cuiry. En mettant en place à l’officine les conditions qui permettent aux laboratoires de s’assurer que la dispensation de leurs produits est faite avec professionnalisme, on prouve que le point de vente est aussi et surtout un lieu de contrôle de l’observance ». C’est dans cette même optique que Phoenix Pharma a lancé un pilote sur l’e-care, un projet qui repose sur le recueil de données de santé visant à mesurer l’efficacité de l’observance pour chaque patient d’une officine Pharmavie. Aujourd’hui expérimenté dans une quarantaine d’officines, l’e-care s’appuie sur des rencontres régionales qui réunissent médecins et pharmaciens, « pour une bonne coordination et une bonne compréhension de ces données ».

Avec les entretiens pharmaceutiques et le suivi des patients chroniques, le maintien à domicile est probablement l’un des vecteurs les plus appropriés pour mettre en place une coopération efficace. C’est en tout cas le pari qu’a fait le groupe Astera avec sa société prestataire Oxypharm qui travaille exclusivement avec les pharmaciens. « Nous considérons que, pour eux, le MAD est une activité doublement positive en termes économiques comme en matière de positionnement, rapporte Gilles Riha, son directeur général. Ils entretiennent une relation de proximité et de confiance avec le patient et sa famille et, en tant que professionnels de santé reconnus, représentent un relais rassurant et éthique dans le parcours de soins. Mais ils doivent le faire savoir et penser leurs points de vente comme un véritable magasin de matériel médical, avec une information et une communication adaptées. C’est tout l’objet de notre offre globale de développement ou OGD ».

Se structurer en association

L’OGD contient notamment un outil de géomarketing, le Géo MAD, qui permet à l’officine d’avoir une vision détaillée de son environnement (population du bassin de vie, concurrents et, surtout, partenaires potentiels), puis d’établir, avec l’équipe commerciale d’Oxypharm, un plan d’action opérationnel. « Cette offre donne d’excellents résultats, se félicite Gilles Riha. Elle est non seulement bénéfique pour Oxypharm, dont le chiffre d’affaires a augmenté de plus de 10 % sur les trois dernières années, mais elle profite surtout aux pharmaciens qui y ont adhéré : la croissance de leur activité MAD est en moyenne de 25 % ».
Pour aider les pharmaciens à être identifiés comme les acteurs incontournables du MAD, Oxypharm organise en parallèle des soirées d’information réunissant des médecins spécialistes et le réseau des officines du bassin de vie sur différents thèmes. « L’hétérogénéité de la population des pharmaciens constitue un frein pour les prescripteurs, constate Gilles Riha. C’est la raison pour laquelle ils doivent se fédérer, voire se structurer en association pour former une population de professionnels plus homogène autour du MAD. Nous les y invitons à chacune de nos soirées ».