Une souffrance silencieuse serait-elle en train de couver au sein de la profession ? Trésorerie, tracasseries administratives, indus, ruptures… Les pharmaciens galèrent, selon l’USPO qui a sondé les confrères il y a quelques semaines et récolté des dizaines de témoignages édifiants.
« Aujourd’hui, je compte les années qu’il me reste à travailler et je rêve du jour où je passerai la main si je trouve une personne assez folle pour racheter mon officine », témoigne par exemple Frédérique, installée en Bretagne. « En plus des missions habituelles, nous devons fliquer nos patients gratuitement pour le compte de la CPAM », s’insurge encore Julien, titulaire en Charente.
Désormais, 4 pharmaciens sur 10 se disent d’ailleurs prêts à revendre leurs officines d’ici 2030, selon le sondage mené en ligne par l’USPO sur 3 100 pharmaciens répondants mi-février.
« Je ressens une frustration, car j’aimais mon métier »
Beaucoup évoquent leurs inquiétudes, liées, aussi, à une trésorerie de plus en plus dans le rouge. Aussi, les trois quarts des officinaux sondés par l’USPO disent connaître des problèmes de trésorerie, 80% que la situation économique s’est dégradée sur les trois dernières années. Preuve, s’il en fallait une, des baisses de rentabilité constatées, cette année encore, en officine.
« Aussi, la moitié des pharmaciens n’ont pas pu investir cette année, pour moderniser leur équipement ou lancer de nouveaux services », illustre Pierre-Olivier Variot, président de l’USPO. « La charge de travail croissante ne me permet plus de me former ni de m’informer suffisamment », ajoute par exemple un pharmacien de Charente. « Je ressens une frustration, car j’aimais mon métier, je ne voulais pas prendre ma retraite anticipée », abonde Isabelle, installée en région parisienne.
« Je suis épuisée par les changements constants de réglementation »
Entre les justificatifs de prescription pour les analogues du GLP-1, le passage de la codéine et du tramadol sur ordonnance sécurisée, l’utilisation d’Asafo, les rejets mutuelles… 96% des confrères interrogés dénoncent le poids des lourdeurs administratives. « Et 90% d’entre eux craignent que ces démarches ne soient source d’indus à cause de leur complexité », poursuit Pierre-Olivier Variot.
« J’ai 38 ans de métier et je suis épuisée par les changements constants de réglementation… et à application immédiate !! », déplore ainsi Nathalie, pharmacienne dans les Bouches-du-Rhône, qui souligne que « le burn-out (la) menace depuis plusieurs années ».
Vers l’ouverture d’un avenant 2 ?
Le sondage et les témoignages « reflètent ce que nous avions prédit avec la signature de l’avenant », constate amèrement Pierre-Olivier Variot. 10 mois après cette signature qui entérinait des hausses d’honoraires pour toutes les pharmacies, force est de constater que les confrères restent sur leur faim. Toujours selon le sondage mené par le syndicat – non signataire de l’avenant – 97 % des confrères se disent insatisfaits des revalorisations actées avec la Cnam.
« En dix ans, l’EBE des officines n’a cru que de 5%, alors que l’inflation, elle, a augmenté de 25 %. Le réseau est en souffrance », résume le président de l’USPO, qui réclame l’ouverture d’un second round de négo avec la Cnam. 87 % des sondés sont d’ailleurs favorables à l’ouverture d’un avenant 2. Mais pour l’heure, les tutelles n’ont pas encore répondu à la demande du syndicat.