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« Des mesures en trompe-l’œil » : l’Académie de pharmacie tance la proposition de loi contre les pénuries de médicaments

Présentée à la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale le 14 février, la proposition de loi visant à lutter contre les pénuries de médicaments a fait réagir l’Académie nationale de Pharmacie.

« Des effets inverses de la solution recherchée. » L’Académie nationale de Pharmacie a vivement réagi à la présentation de la proposition de loi du groupe socialiste visant à lutter contre les pénuries de médicaments. Présenté devant la Commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale le 14 février, ce texte propose d’inscrire dans la loi une obligation pour les industriels de détenir un stock de sécurité « plancher » de 4 mois pour les médicaments d’intérêt thérapeutique majeur (MITM) et de 2 mois pour les autres médicaments. 

« Soit un doublement des obligations actuelles », déplore l’Académie dans son communiqué. Le texte propose également de relever le stock de sécurité « plafond », qui passerait à 8 mois pour les MITM et 6 mois pour les autres médicaments contre 4 mois pour tous actuellement, ainsi que de renforcer les sanctions financières de l’ANSM à l’encontre des industriels qui ne respecteraient pas les obligations de stocks de sécurité.

Vers des arrêts de commercialisation ?

Pour l’Académie, « cette course au surstockage sera nécessairement contre-productive et déceptive. Elle dégradera encore la situation et amplifiera le phénomène des pénuries, allant à l’inverse de l’objectif affiché ». En cause notamment, le coût engendré par de telles mesures. « Sans nul doute, l’augmentation substantielle des coûts qu’elles vont engendrer va se traduire par une augmentation des arrêts de commercialisation pour un grand nombre de médicaments matures insuffisamment valorisés et indispensables aux patients, tout spécialement pour des médicaments de niche dont certains médicaments de pédiatrie », assure l’Académie.

Des prévisions inquiétantes, après une année de 2023 de tous les records, avec 4 925 signalements de rupture de stocks enregistrés par l’ANSM. Soit une hausse d’environ 30% par rapport à 2022 et de 128% par rapport à 2021, où « seulement » 2 160 alertes ont été recensées. « Est-ce raisonnable de jouer cette carte et celle de l’augmentation des sanctions en laissant ainsi penser que l’on va améliorer la disponibilité des médicaments ? Si cela devait être, on aurait déjà dû en voir les bénéfices suite aux récentes mesures législatives et réglementaires qui ont déjà durci les obligations des opérateurs, ce qui n’est pas le cas, puisque le nombre de pénuries augmente », regrette l’Académie.

La proposition de loi devrait être examinée en séance publique d’ici la fin du mois.